mercredi 21 février 2018

EXTRAITS de la nouvelle version




ACTE 1


ACTE 1 Scène 1 (le professeur de musique, Félix le serveur)

Lumière. Une femme est assise sur un tabouret et joue du piano depuis la petite estrade. On entend de la musique mais le piano n'existe pas.
C’est "rêve d'amour" de Frantz Liszt.

Les yeux fermés la femme  pianote les mains devant elle. Très inspirée.
Félix, le serveur arrive par la double porte, il dépose doucement sa veste sur le portemanteau ne voulant pas la  déranger. Il s’adosse au comptoir et continue à l’écouter.

La femme ouvre les yeux. L’air s'interrompt.

Félix – C’était très beau ce que vous jouiez.
Diane (semblant sortir d’un rêve) - Ce que je jouais ?…..Qui êtes-vous ?
Félix – Le serveur.
Diane - Le serveur ... (Elle semble ne pas comprendre) Où suis-je ?
Félix – Au Bar des Musiciens Défunts.
Diane - (répétant sans rien comprendre) Au bar des musiciens...défunts ?
Félix – Oui, tout en majuscules. C’est écrit devant la porte. Vous êtes morte….Je vous offre un verre ?

Il fait le tour du comptoir et sort deux verres. La femme se lève et regarde la salle du bar depuis l’estrade.

Félix – Qu’est-ce que vous voulez boire ?
Diane(l’esprit ailleurs) Une eau minérale….mais attendez ! Il y a deux secondes, vous me disiez que c’était très beau ce que je jouais ! Alors ça signifie quoi ce "vous êtes morte " ?
Félix – Oui, c’est vrai, c'était très beau. Mais vous avez vu un piano sur scène ?….Glaçons ?
Diane(regardant vers la scène) Mais je ne peux pas être morte puisque je vous parle.
Félix – Moi aussi…je suis mort.

Un temps. La femme se met à sourire.

Diane
Cessez de vous moquer, cessez de m’faire marchez
De vie à trépas comment ais-je pu trépasser ?
Cessez de vous moquer, cessez de m’faire marchez
Alors que vous êtes là à pouvoir me parler.

Félix
Vous êtes décédée, là n’est pas la question
Remplissez-vous au moins les bonnes conditions ?
Le sens de l’harmonie, connaître les partitions
La musique est-elle  une véritable passion ?
Car pour entrer au bar des Musiciens Défunts
Vaut mieux être connu plutôt que crève-la faim
Et vos plus beaux souliers, votre plus cher parfum
Ne feront pas de vous un musicien défunt.

Elle regarde ses souliers, hausse les épaules avant de quitter l’estrade  et aller vers le comptoir.

Diane – Excusez-moi, mais je n’ai pas retenu votre nom ?
Félix – Félix, serveur. Et vous ?
Diane –Moi ?....euh...C'est.... (Cherchant dans sa mémoire)...Ça c'est la meilleure...

Félix
Vous ne vous souvenez plus ? Classique, choc violent.
Asseyez-vous un peu. Ça reviendra sûrement.

Diane
Cessez de vous moquer, vous allez m’énervez
Cessez de m’faire marchez, je suis fatiguée

Félix
Vous êtes décédée, là n’est pas la question
Remplissez-vous au moins les bonnes conditions ?
Le sens de l’harmonie, connaître les partitions
La musique est-elle  une véritable passion ?

Diane
Musique classique longtemps j’ai enseigné
Si ça vous plait ainsi, je vous laisse divaguer

Félix
Car pour entrer au bar des Musiciens Défunts
Vaut mieux être connu plutôt que crève-la faim
Et vos plus beaux souliers, votre plus cher parfum
Ne feront pas de vous un musicien défunt.

Diane
Cessez de vous moquer, vous allez m’énervez
Musique classique longtemps j’ai enseigné
Cessez de m’faire marchez, je suis fatiguée
Si ça vous plait ainsi, je vous laisse divaguer

Félix
Vous êtes décédée, là n’est pas la question
Remplissez-vous au moins les bonnes conditions ?
Le sens de l’harmonie, connaître les partitions
La musique est-elle  une véritable passion ?
Car pour entrer au bar des Musiciens Défunts
Vaut mieux être connu plutôt que crève-la faim
Et vos plus beaux souliers, votre plus cher parfum
Ne feront pas de vous un musicien défunt.

Diane
Musique classique longtemps j’ai enseigné
Si ça vous plait ainsi, je vous laisse divaguer

Félix
Dans les bals populaires, dans les petits concerts,
Le groupe nous rapportait un petit peu d’argent
Mais désormais je sers pour les anniversaires
Pas assez célèbre pour être un des clients,
Je suis prince du cocktail, le roi du dernier verre.

Diane
Cessez de vous moquer, vous allez m’énervez
Cessez de m’faire marchez, je suis fatiguée

Félix
Vous allez, vous verrez, adorer cet endroit
Où tous genres confondus, les musiques se côtoient.
Vous allez vous verrez adorer cet endroit
Quand vous découvrirez qui ce soir est le roi.
Ça rit et puis ça boit, mais tous restent courtois
Vous allez vous verrez adorer cet endroit

Diane Mmm… (Pas convaincue) Pour l’instant tout ce que je vois c’est un verre d’eau et une salle vide. De là à adorer...
Félix – Patience, ça va venir…Excusez-moi mais j’ai un cocktail à préparer…
Diane – Faites donc… Félix.

Elle s’éloigne du comptoir pendant que le serveur commence à sortir son matériel et ses alcools pour son cocktail. Elle se rapproche de la petite scène.

Diane (pour elle-même) - Et d’abord comment suis-je arrivée ici ?

Tout en essayant de se souvenir, elle finit son verre avant de remonter sur l’estrade.

Diane(toujours dans ses pensées) Je me rappelle que je jouais du piano, il y a un tabouret mais…où est passé le piano ?

Elle regarde autour d’elle, va derrière le rideau, revient et lève les yeux au plafond, semblant le chercher.

ACTE 1 Scène 2 (Tchaïkovski, Diane, Félix)

Entre-temps, un homme entre, la cinquantaine, bien habillé mais style 19ème siècle. Il dépose son haut de forme et sa veste sur le porte manteau à droite de l'entrée.

Tchaïkovski –Bonjour Félix.
Félix – Bonjour Maestro.

Il s’avance jusqu’à l’estrade et s’adresse à la femme qui cherche toujours au dessus d’elle.

Tchaïkovski – Bonjour.
Diane – Bonjour.
Tchaïkovski - Excusez-moi ? Je peux monter ?
Diane – Bien sûr. Faîtes….

Elle lui laisse la place et va jusqu’au comptoir, reposant son verre et réfléchissant la tête entre les mains. L’homme s’asseoit devant un piano imaginaire puis commence à jouer un petit air jazzy[1]. La femme redresse la tête.

Diane Je connais ce morceau….c’est « La panthère rose »
Félix – Oui…ah ça il est plus rose que panthère mais bon…
Diane(regardant vers l’estrade) Où est le piano ?
Félix – Il n'y a jamais de piano.
Diane – Mais qui est ce qui joue ?
Félix – Tchaïkovski.
Diane –Tchaïkovski ?
Félix –Lui-même mais je l’appelle souvent Maestro… (Voyant que Diane ne comprend pas) Sur scène, enfin ! Là ! Piotr Ilych Tchaïkovski.

La femme écarquille les yeux reconnaissant le célèbre compositeur puis s’évanouit. Tchaïkovski s’arrête de jouer.

Tchaïkovski – Que se passe-t-il ?
Félix – L’émotion sans doute !
Tchaïkovski – Je jouais de manière si renversante ? (quittant l’estrade) Allons ! Laissez-moi faire ! Avec ce diablotin de Mancini, je me sens d’humeur magicienne !

Il sort sa baguette de chef d’orchestre de l’intérieur de sa veste. On entend Baby Elephant Walk d’Henry Mancini.

Il agite sa baguette au dessus de Diane. Celle-ci, toujours les yeux fermés, se relève ressemblant à une somnambule.

Félix – Waouh ! Super ! Asseyez-la sur cette chaise maintenant !

Félix a tiré une chaise de la table N°3. S’ensuit un jeu de scène où Tchaïkovski tentera maladroitement de déplacer Diane jusqu’à la chaise. Celle-ci toujours dans un état second se déplace complètement à jardin poursuivi par Félix et sa chaise.
Elle monte jusqu’à l’estrade au lieu de s’asseoir.

Félix – Maestro ! A quoi vous jouez ? 
Tchaïkovski – Elle est difficile à diriger cette petite. Je manque sans doute d’expérience. Montez la chaise sur l’estrade, je crois que je la tiens là.
Félix monte avec la chaise mais Diane redescend aussitôt vers le fond de scène table 1.

Félix – Je croyais que vous la teniez !
Tchaïkovski – Moi aussi. Allez-y ! Allez-y !

Félix redescend et s’approche doucement. Diane s’échappe jusque devant la scène au nez et la barbe d’un Félix visiblement agacé.

Félix – Ca n’aurait pas été plus simple de la porter ?
Tchaïkovski – Elle m’échappe ! Elle va retomber !

Félix pousse sa chaise du pied. Diane fait un tour sur elle-même avant de retomber sur la chaise[2].

Félix – Ouf ! C’était moins une ! 
Tchaïkovski – (Rangeant sa baguette) Je crois que je ne suis pas fait pour la magie.
Félix – Regardez Maestro, elle revient déjà à elle. Allez ! Ouvrez les yeux…cessez de jouer à « la belle au bois dormant »[3].

Tchaïkovski s’est avancé.

Tchaïkovski – Félix, arrêtez vos allusions et apportez une petite vodka. (Le serveur s’exécute, retournant au comptoir tandis que la femme rouvre les yeux) Alors, ça va mieux ? (La femme le regarde, effarée.) Je vois. Vous, vous êtes morte depuis peu et vous commencez à peine à vous en rendre compte.

La femme approche doucement sa main et le touche du bout du doigt.

Tchaïkovski(souriant) Oui. Je suis bien devant vous.
Félix – (apportant le verre de vodka) Seuls les morts peuvent se toucher entre eux.

Elle se lève subitement de sa chaise, recule, tourne de l’œil et s’effondre sur le sol.

Tchaïkovski(se grattant la tête) Je crois qu’elle ne supporte pas la mort.
Félix – Sans blague ?
Tchaïkovski – Qui est-ce ?
 Félix – Je ne sais pas. Elle m’a dit qu’elle était professeur de musique.

Félix, après un instant d’hésitation, boit une rasade du verre destiné à la femme.

Tchaïkovski(Intrigué) Tiens ? C’est étrange qu'elle soit arrivée ici. Est-ce qu'elle composait aussi ?
Félix – Je ne sais pas non plus. Vous pourrez toujours lui demander à son réveil. Si elle tient debout...
Tchaïkovski – Ma notoriété post-mortem a l’air de lui poser problème. Je repasserais ce soir.
Félix – Mais j’espère bien que vous repasserez ce soir ! Le bar est tout à votre honneur pour votre semaine d’anniversaire !
Tchaïkovski(d'un air las) Oui je le sais. Une semaine entière d’anniversaire. Toutes ces festivités m’ennuient….
Félix – Il n’y aura que des amis. Mr Glinka. Mr Grieg. Et Mme Callas a promis de passer. Elle ne vous laisse pas indifférent la Callas !
Tchaïkovski – Elle est gentille mais je ne supporte pas lorsqu'elle chante... Et puis vous savez les femmes…par contre, (désignant l’enseignante au sol) j’aimerais que celle-ci soit là ce soir.
Félix – La dormeuse ? Nous la connaissons à peine.
Tchaïkovski – Nous pourrons faire connaissance. Je la trouve…sympathique

Tchaïkovski  remet sa veste et son haut de forme.

Félix – Bon, à ce soir alors !
Tchaïkovski – A ce soir…Ah, Félix ?
Félix – Oui ?
Tchaïkovski(avec un regard coquin) Vous êtes très élégant ce matin.
Félix – (avec un sourire entendu) Maestro, vous me faites le compliment chaque fois que vous passez et vous savez très bien que contrairement à vous, les femmes ne me sont pas indifférentes.
Tchaïkovski – Hélas !….Prenez soin de la petite nouvelle !

Il sort. Félix sourie en secouant la tête puis regarde la femme toujours au sol. Il finit le verre de vodka avant de le poser sur le comptoir.

Félix – Allez au boulot !

Il tente de la soulever jusqu’à une chaise mais trébuche. Il se redresse, réfléchit.

Félix – C’est que je n’ai pas de baguette magique moi…Une bonne claque,  peut-être ? (Il hésite, levant la main) Un baiser ?... (Il hésite encore) Et si elle a mangé un truc qui pue avant de mourir ? Oh ! Et puis merde… elle va bien se remettre toute seule !

Il retourne derrière le comptoir et continue à préparer son cocktail. Il commence à chantonner l’air de « la charge des Walkyries » de Wagner en même temps que la musique se fait entendre.

ACTE 1 Scène 3 (Sonia, Diane, Félix)

Sonia,  entre sur scène habillée en Walkyrie, sur l’air de Wagner. Elle s’arrête au centre de la scène et prend plusieurs poses guerrières avec une épée en bois puis attend la réaction de Félix. La musique s'arrête progressivement.

Sonia
Meurs infâme ou bien déguerpis,
Dans mes deux mains, glaive ne frémit,
Des plus vaillants il a occis
Ais-je une tête de Lady ?

(Se tournant vers Félix)
Dans un vieux bazar à fourbi,
Ce costume de walkyrie
J’ai échangé contre un tapis
Mais pour Wagner, il vaut son prix

Félix
Aurais-tu perdu un pari,
Pour risquer un coup de fusil ?
Cette parodie de valkyrie
Ça va déplaire à Tchaïkovski

Sonia
(N’ayant pas entendu)
L’anniversaire de Wagner
N’est pas pris à la légère.
Je vais charger, croiser le fer,
Traverser toutes les frontières,
Mes ennemis prendre à revers,
Les mettre tous genoux à terre !

Félix a sorti un cahier de sous le comptoir.

Félix
(Lui montrant son agenda)
Aurais-tu perdu la raison ?
Tu te trompes de partition
Arrête tes divagations
Ici, c’est une autre chanson

Sonia
(Réalisant)
L’anniversaire de Tchaïkovski
Etait prévu pour aujourd’hui ?
Eventrée sur le tatami,
Et bien loin de sa Germanie,
Pour s’être trompé de Lundi,
La valkyrie est au tapis.

Félix
On ne peut changer la soirée
Les festivités sont lancées
D’ailleurs celle-ci est invitée
Elle a fraîchement débarquée
Je ne sais d’où elle est tombée.
Si tu pouvais la réveiller.

Il lui montre l’enseignante sur le sol qu’elle n’avait pas vu lors de son délire de Walkyrie.

Sonia-  Qui est-ce ?
Félix – Je ne sais pas, elle semble amnésique.



[1] The Pink Panther d’Henry Mancini morceau de 2 minutes 44
[2] Cela permet à la comédienne en ouvrant un peu les yeux de visualiser l’emplacement de la chaise avant de s’asseoir.
[3] Ballet de Tchaïkovski 


Siegfried Wagner

Siegfried Wagner
restera-t-il dans les marguerites jusqu'au cou ?

Les Dvorak

Les Dvorak
viendront-ils à l'anniversaire ?

Les GRIEG

Les GRIEG
seront-ils aussi présents ?